En France, nous avons une culture de la punition encore très ancrée dans la société et les pratiques parentales. Nous avons, il faut bien le dire, une fâcheuse tendance à raisonner en pointant l’aspect négatif des choses. Alors bien sûr, quand il s’agit de parentalité, nous avons cette même facilité à pointer les comportements qui ne nous plaisent pas chez nos enfants et à souhaiter les corriger avec des actions négatives telles que les punitions ou d’autres violences.

La première référence que j’ai lu concernant mon invité du jour était pendant mon master en management et coaching. Le sujet était alors d’économiser temps et énergie avec les équipes pour aller vers des interactions efficaces et comme on dit « gagnant – gagnant ». Je fus très surpris de retrouver à nouveau ses travaux comme sources chez des personnes qui défendent la punition en France comme un outil parental universel et efficace voire apprenant. Alors, je me suis dit « Et si j’allais demander directement à la source ? ».

Mon invité du jour est le Docteur Alan Kazdin, Professeur de psychologie et de pédopsychiatrie à l’Université de Yale et directeur du Yale Parenting Center. Il a été président en 2008 de l’American Psychological Association et est l’auteur de 49 livres destinés à un public professionnel sur des sujets tels que la parentalité et l’éducation des enfants, la psychothérapie infantile, les traitements cognitifs et comportementaux et la violence interpersonnelle. Son œuvre a été traduite en plusieurs langues à travers le monde. Tout cela a fini par être nommé « La méthode Kazdin ».

Nous allons ici échanger la parentalité, ni gentille, ni méchante mais basée sur les preuves, sur la science. Vous ne trouverez dans cet épisode aucun conseil d’ordre moral mais simplement ce qui est efficace et prouvé par la science. Vous pourrez vous sentir en accord ou en désaccord selon l’endroit où vous placez vos valeurs morales. Je n’exprimerai pas les miennes dans cet épisode.

Pour préparer cet entretien, je me suis basé sur son livre « The Everyday Parenting Toolkit » et sur son cours gratuit « Everyday Parenting: The ABCs of Child Rearing » dont vous trouverez le lien en description de cet épisode.

En parlant d’ABC, j’aimerais rapidement détailler ces 3 lettres qui signifie :

– A pour Antécédents : l’ensemble des messages, attitudes et contexte qui vont amener le comportement

– B pour Behaviour (comportement en FR) : il s’agit d’identifier le comportement qui pose problème et surtout son opposé positif qui est adapté.

– C pour Conséquences : ce qu’il peut se produire lorsque le comportement se produit. Attention cela peut être négatif mais, nous le verrons, surtout positif.

Voilà une base sommaire pour mieux comprendre notre échange. Je vous invite à nouveau, peut être après l’écoute de cet épisode, à suivre le cours en ligne qui est très complet et dans lequel toute la nuance nécessaire est développée.

Dans cet épisode vous pourrez nous entendre parler de « changer l’enfant ». Je tiens à préciser qu’il n’est pas question de changer QUI EST l’enfant mais simplement de l’aider à trouver des comportements adaptés pour certaines situations précises.

Ce qui m’a paru essentiel dans les travaux du Dr Kazdin est avant tout la mise en avant des interactions positives avec les enfants. Pendant qu’en France la punition est souvent la première intention, existe-t-il d’autres chemins ? Peut-être aussi que nous ne savons tout simplement pas faire ! Cela peut-il s’apprendre ? 

Comment savoir si les comportements que nous attendons de nos enfants sont normaux ou accessibles ? Comment mettre tout cela en œuvre ?

La punition est-elle efficace ou apprenante ? De quoi on parle quand on parle de time out ?

Enfin, je reviendrai sur la pratique française qui revient à la mode dans les médias, maladroitement comparée au Time Out et que l’on nomme « File dans ta chambre ! ». Nous verrons quel est l’avis du Dr Kazdin sur ce qui est proposé dans cette pratique.

Commençons tout de suite notre épisode ! J’espère qu’il vous apportera des pistes pour des solutions efficaces dans vos vies de parents.

Je vous souhaite une très bonne écoute.

Cédric Rostein (CR)

Pourriez-vous décrire ce qu’est la méthode Kazdin ? S’agit-il d’un guide universel et miraculeux visant à faire obéir les enfants ? Doit-on suivre cette méthodologie en permanence ? S’agit-il d’une méthode visant à devenir un parent parfait ?

Alan Kazdin (AK)

Hmm, le nom de la méthode Kazdin est déjà un nom auquel je m’oppose. Ça n’a jamais été mon intention d’avoir ce nom. Enfin, c’est une autre histoire. La raison en tout cas, c’est que les techniques de cette méthode proviennent des résultats de plusieurs décennies de travaux de recherche en laboratoire visant à comprendre comment changer le comportement humain. C’est basé sur la science et cela a été appliqué à plusieurs espèces.

Donc la méthode Kazdin c’est quoi ? C’est le recours à plusieurs procédés qui permettent de changer le comportement humain, et qui peuvent le faire d’une manière plus simple que les pratiques quotidiennes auxquelles on a souvent recours.

Le but n’est pas de faire en sorte que les enfants obéissent. Par contre, le concept vise à développer des comportements et des habitudes. Les parents peuvent déterminer ce que sont ces habitudes, mais en gros la méthode vous permettra d’atteindre cet objectif de manière efficace. On change le comportement, on impacte le cerveau. Et donc en conséquence on change les émotions des personnes et comment elles se perçoivent elles-mêmes dans la société. 

CR

S’agit-il d’un outil à utiliser en permanence avec les enfants ?

AK

J’aime penser à cette méthode comme à une boîte à outils. Si vous êtes satisfait de votre parentalité, et satisfait des résultats et vous aimez la manière dont votre enfant grandit et se développe … alors vous n’avez sans doute pas besoin d’avoir recours à cette méthode du tout. Mais si vous aimeriez que votre enfant soit plus coopératif, qu’il soit un peu plus altruiste, honnête ou même gentil avec ses frères et sœurs et que vos méthodes ne fonctionnent pas. Que vous criez, que vous punissez … alors on a la possibilité avec notre méthode de vous aider à régler ces problèmes de comportement plus rapidement, de manière plus sécurisante et plus permanente. Donc en ça, c’est comme un outil. Dans toutes les maisons du monde on trouve des outils et on n’utilise ces outils que lorsque l’on en a besoin. Si vous vous baladez chez vous avec un marteau et une pince sans raison, vous êtes un peu bizarre. Mais si vous utilisez ces outils de votre boîte à outils lorsque vous en avez besoin, alors vous êtes bien équipé.

CR

Okay (rires). J’aime beaucoup comment vous décrivez cette situation ! Vous parlez de comportements, de comportements à changer dans nos relations avec nos enfants. Comment identifiez-vous le comportement qui pose problème ?

AK

Eh bien, le parent est l’arbitre de cela. Le critère habituel c’est est-ce que le comportement en dehors du cocon familial interfère avec le quotidien de la personne ? Pour un enfant, ça peut être à la maison avec les frères et sœurs, ou avec les voisins, ou encore à l’école. Et quand je dis ça, c’est pas avoir de petits problèmes, on parle d’interférence significative. De véritables problèmes qui empêchent le déroulement normal de la journée.

Le parent peut dire “mon enfant n’écoute jamais”. Et en fait, l’enfant … il écoute souvent. Mais pas souvent ou pas assez ce parent. Eh bien, on peut faire en sorte que l’enfant obéisse et écoute plus ce parent si c’est ce qu’il veut. On peut aussi expliquer au parent les taux d’écoute normaux mais bon c’est au parent d’être l’arbitre et de dire où et quand intervenir. Parfois les écoles aussi.

CR

Est-ce que ça arrive qu’un parent demande à changer un comportement qui est en fait tout à fait normal et en phase avec le développement de l’enfant ?

AK

Oui. très souvent avec les jeunes enfants. Les parents sont souvent inquiets que leur enfant ne mange pas “à la bonne heure”, ne dorme pas “à la bonne heure”, ou encore qu’il pleure “sans raison apparente”. Pourtant il y a beaucoup de raisons ! Par exemple, la science a montré que la croissance osseuse est douloureuse. Donc la première étape c’est vraiment d’éduquer le parent. Un exemple : un enfant de 18 mois est venu consulter à ma clinique car il avait des problèmes à la crèche. Le problème en fait c’était qu’il ne dormait pas pendant les heures de sieste de la crèche. Tout le monde dormait à 10h30 le matin mais pas lui. Donc ils me l’ont envoyé pour le traiter pour changer le comportement de l’enfant. J’ai appelé le prof et on a parlé 1h ensemble, et j’ai renvoyé le parent chez lui. Parce que les parents et les profs ont des croyances profondes à propos de comment les choses doivent se passer, alors que dans la réalité le spectre de ce qui est typique est bien plus grand. Si un enfant refuse d’aller se coucher à 22h30 et qu’il a 8 ans, oui on peut regarder ce qu’il se passe. Mais si il a 18 mois, alors l’enfant n’a pas de problème, ce sont les parents et les profs qui en ont.

CR

En lisant vos travaux, j’ai eu l’impression que votre méthode vise plutôt à changer les parents et pas vraiment l’enfant. C’est bien ça ?

AK

Non, changer un enfant c’est en fait la partie la plus facile. Et souvenez vous que mon travail a débuté en travaillant avec des enfants très agressifs et antisociaux. Des enfants qui étaient hospitalisés car ils étaient très sévèrement perturbés. On travaille avec les parents pour leur apprendre les techniques leur permettant de changer le comportement de l’enfant. Et en fait, beaucoup de choses que les parents entreprennent en ce sens ne découlent pas sur les comportements qu’ils souhaitent observer. Donc on travaille avec les parents, on n’a pas vraiment besoin de travailler avec les enfants.

CR

On a parlé du comportement qu’on a besoin de changer. Vous évoquez le comportement positif opposé qu’il est nécessaire d’encourager. Mais comment peut-on identifier précisément ce comportement positif opposé ?

AK

Facile ! Très facile même. Vraiment ! En gros, le parent dit “je veux faire en sorte que mon enfant arrête de faire ça”. Alors on dit “Okay, compris. Que voulez-vous que votre enfant fasse à la place ?” Par exemple, “au lieu de se battre avec sa sœur, de lui crier dessus et de lui piquer ses jouets, je voudrais qu’il joue calmement avec elle et qu’il partage ses jouets”. On peut développer cela. Alors je demande “que faites-vous maintenant quand ils se disputent et ne partagent pas aujourd’hui ?” et on me dit souvent “Quand ça arrive, il se dispute avec elle, je lui crie dessus et je le mets dans sa chambre.”

Qu’est ce que la science nous dit à ce sujet ? La science nous montre que cela ne changera pas le comportement de votre enfant et que ça ne lui fera pas développer de nouvelles habitudes. Ça ne marchera donc tout simplement pas. Alors oui, vous aurez l’impression que ça marche car vous avez enfermé l’enfant mais ça ne changera rien durablement. Que voulez-vous précisément ? Qu’il joue calmement ? Gentiment ? On peut développer ça. D’ailleurs ce n’est pas très difficile. Donc la clé, c’est de réfléchir à ça : par quoi voulez-vous remplacer ce comportement.

Vous n’aimez pas la manière dont votre conjoint fait telle chose ? Ne vous plaignez pas. Que voulez-vous que votre conjoint fasse à la place ? On peut développer ça. On peut créer une nouvelle habitude. L’habitude change le cerveau, alors créons une nouvelle habitude et c’est fini. On a fini le programme pour.

Donc l’opposé positif c’est se poser la question “que voulez vous à la place?” Vous voulez que votre fils joue gentiment avec votre fille. On peut le faire. En façonnant le comportement, avec des simulations et des encouragements. Ce n’est pas difficile. Cependant, si vous continuez de vous baser sur les punitions, je vous garantis que ça s’arrêtera seulement sur le moment mais ça ne changera rien dans le problème de comportement à terme, pas plus que ça ne permettra de développer les habitudes que vous souhaitez encourager.

Le problème, comme vous le savez sans doute, concerne le cerveau. Le cerveau est dur, il est connecté pour se nourrir de choses négatives. Donc que se passe-t-il quand les mauvais comportements (entre guillemets) font surface ? On répond immédiatement. Le terme technique en psychologie c’est … normal. Donc oui on doit éduquer et entraîner les parents à faire autrement.

CR

Je vous demandais à l’instant comment savoir si un comportement est typique ou non conforme au developpement de l’enfant, mais pour aller plus loin : comment savoir que le comportement que nous recherchons est accessible pour l’enfant ?

AK

Vous avez raison. Les comportements ne sont pas tous accessibles de la même manière pour tous les humains. Mais on peut les développer. Il y a des méthodes pour les développer. Par exemple si quelqu’un se lance … hmm vous jouez d’un instrument de musique ?

CR

Oui, des percussions. Des percussions africaines ?

AK

Si vous connaissez les instruments de musique, c’est exactement pareil ! C’est-à-dire qu’on peut débloquer un comportement inaccessible en commençant par les gammes, les rythmes et à un moment, quand on en arrive à la fin on se demande “mais comment cette personne en est-elle arrivée là ?”. Parce qu’on ne voit pas le point de départ ! Le violoniste, le pianiste … ils travaillent leurs gammes, leurs accords, ils s’entraînent eux aussi. Et au début pour eux non plus ce morceau de Rachmaninov n’était pas accessible. C’est exactement la même chose avec le comportement humain. On peut le rendre accessible. Et quand on y arrive, on ne réalise pas toujours le chemin qu’il a fallu emprunter pour y arriver. Donc l’accessibilité fait partie du programme.

Et quand on forme les parents à encourager et à féliciter, ça a parfois l’air complètement inaccessible car tous les parents pensent qu’ils sont supers, alors qu’ils sont tous plutôt mauvais  pour prodiguer le type d’encouragements dont je parle. On s’entraîne note par note, accord par accord, partition par partition jusqu’à atteindre l’objectif.

CR

Vous savez, en France, on a beaucoup recours aux punitions pour les enfants. On entend notamment beaucoup qu’ils ne sont pas assez sages, ce serait mieux s’ils étaient différents. Vous parlez beaucoup d’encouragements, et de comportements positifs à adopter envers les enfants, alors comment faire des encouragements efficaces ? J’aimerais approfondir cette question car j’ai l’impression que l’on ne sait pas vraiment comment faire cela en France.

AK

On explique aux parents qu’il y a 2 types d’encouragements. Les encouragements que vous utilisez actuellement, et ceux-là : continuez, ne changez rien. C’est super pour les relations humaines. Et faites-en encore plus ! Et puis … il y a un autre type d’encouragement. Et c’est précisément ce type qui permet d’impacter et de changer les comportements humains. Et il y a de grandes chances pour que ce ne soit pas le type d’encouragement que vous utilisez actuellement. Voilà comment ça marche : pour un jeune enfant, l’encouragement est composé de 3 ingrédients : tout d’abord, ce doit être démonstratif ou expansif ! Je vous explique dans un instant. Ça doit expliquer exactement ce que l’enfant a fait. Et enfin cela doit inclure quelque chose d’affectueux et de non verbal comme une caresse par exemple. Donc si votre enfant joue gentiment avec sa sœur et que tout se passe bien, c’est précisément le moment auquel il faut vous précipiter vers l’enfant pour dire, en français bien entendu, “c’était fantastique, c’était super”. Et ensuite vous expliquez ce qu’il s’est passé. “Tu joues avec ta soeur gentiment sans te disputer !”. Puis vous touchez l’arrière de sa tête, vous caressez son épaule ou encore vous donnez un petit bisou, peu importe. Ces 3 ingrédients ont montré qu’ils étaient essentiels pour faire la différence. S’agit-il de votre manière habituelle d’encourager et de féliciter ? Non, mais ce n’est pas grave : ne changez pas ça. Ce nouveau type d’encouragement fait désormais partie de votre boîte à outils.

Vous voulez changer votre enfant ? Il y a des choses à mettre en place et l’une d’entre elles ce sont les encouragements avec ces 3 ingrédients de manière répétée. Une fois que vous l’avez fait pendant un moment, arrêtez. L’habitude a été créée et c’est bon. Mais on doit entraîner les parents car ils pensent tous être bons là-dedans. Ils commencent en disant “oh super tu as joué avec ta soeur, bien joué”. NON NON NON ! C’est plutôt “C’était GENIAL !” et on le met en scène, on façonne le comportement car comme vous le disiez plus tôt, le comportement ne semblait pas accessible initialement. Alors on construit tout ceci avec les parents et assez rapidement, les parents sont très bons et le font bien. On a créé l’habitude chez le parent car il y a une chose fondamentale : le fait que les gens comprennent quelque chose n’est pas suffisant pour que le comportement change. Donc on ne veut pas que les parents comprennent ce que l’on fait, ça c’est un luxe. C’est bien si ça arrive mais ça ne changera pas le comportement. Et je dois vous avouer que les parents ne sont pas toujours d’accord quand il s’agit de leurs enfants. Ils disent à leurs enfants : “tu sais que tu ne dois pas taper ta soeur” mais ils ignorent les résultats des travaux de recherche qui disent clairement que savoir ne change pas le comportement humain ! On sait tous par exemple que c’est bien de manger des brocolis et des épinards, mais quand était la dernière fois que vous en avez mangé ? Ne répondez pas, c’est rhetorique. On sait tous qu’il ne faut pas fumer. On sait, on sait, on sait tout ça. On sait qu’on doit se faire vacciner. Mais le comportement humain n’est pas influencé par la connaissance ou l’attitude. Pourtant les parents insistent souvent et disent “mais tu le sais enfin, pourquoi fais-tu ça ?”.

Un exemple : on a eu un président, dont j’ai oublié le nom et le pays, qui a eu des relations sexuelles avec une stagiaire. Et tout le monde disait “mais pourquoi est-ce qu’un type aussi brillant a fait ça? Il sait pourtant que c’est mal !”. Du point de vue de la science sociale, il n’y a pourtant aucune surprise ! Savoir ne veut pas dire qu’on agit bien. Donc pour les enfants, on peut leur faire faire des choses sans avoir à leur faire comprendre pourquoi c’est mieux de faire ainsi.

CR

Est-ce que c’est pas un peu bizarre pour l’enfant si son parent n’a pas l’habitude de faire des encouragements très démonstratifs ? Ça ne risque pas de faire peur aux enfants ?

AK

Et bien vous ne sautez pas de votre placard par surprise en disant “bravo !”.

CR 

rires

AK

Vous allez voir votre enfant et vous êtes expansif. Et c’est très important de le faire et de ne pas se contenter de “c’est bien, bien joué”. Non, il convient d’y mettre de l’intention et de l’enthousiasme. Et clairement, c’est plus facile pour certains parents que d’autres. Mais comprenons-nous bien, pas besoin d’être choquant au point où l’enfant fait une crise cardiaque sous l’effet de la surprise. Essayez ! Faites-le plusieurs fois et vous verrez l’enfant sourire. La recherche montre que l’enfant adore ça. Par contre avec un ado, vous ne pouvez pas être trop bruyant. On utilise les mêmes 3 ingrédients mais avec un twist un peu différent pour les adolescents. 

CR

Avant de passer aux conséquences, pourriez-vous me parler des antécédents ? D’après ce que je comprends de vos travaux, il est très important que le comportement ait lieu dans un environnement approprié. 

AK 

Une erreur de compréhension que j’entends parfois à propos de la méthode c’est que le programme consisterait en fait en un système de récompenses. NON, NON et NON. Le programme a 3 composantes fondamentales : que se passe-t-il à la place du comportement recherché, comment changer le comportement et ensuite les conséquences. Et là il s’agit de récompenses. Mais les antécédents sont très importants. Ils dictent le comportement.

Il y a plusieurs types d’antécédents. 

– Tout d’abord les instructions, les consignes. Le plus évident en fait, c’est ce que vous dites à votre enfant. 

– Un autre, c’est votre expression du visage. 

– Et le plus puissant des antécédents pour développer des comportements humains, c’est le défi. Un parent peut dire à son enfant, de manière malicieuse, cet antécédent “Je suis sûr que tu ne peux pas le faire”. Le mettre au défi. Par exemple, “Je parie que tu ne peux pas mettre le couvert. Je sais que tu peux pas, un enfant de 5 ans ne peut pas le faire. C’est sûr. Quand tu seras plus grand, tu pourras, mais là non… Je pense que tu sais comment faire mais non.” Et là, l’enfant va dire “Mais si, je peux ! Je peux ! Je peux !”. Alors le parent va répondre par un autre antécédent “C’est bon, ne t’inquiète pas, t’as pas besoin de le faire. Quand tu seras plus grand tu pourras mettre le couvert.” Et à l’enfant de répondre “Non, non je peux le faire maintenant, je peux !”. Alors le parent lâche prise et dit “Okay, bon je te laisse mettre les couverts sur la table”. L’enfant le fait. Et là vous allez renforcer l’enfant avec des encouragements positifs, car les antécédents ne sont pas la clé du système, c’est vraiment l’ensemble. Maintenant que l’enfant fait le comportement recherché, on a les antécédents, le défi et le comportement. Alors allez voir l’enfant et dites-lui “C’était génial ce que tu as fait ! Je ne pensais pas que tu en étais capable !”. Et au dîner suivant, vous dites à l’enfant “Je parie que tu ne peux pas le faire deux soirs de suite. Aucun enfant de 5 ans ne peut le faire. Et ce n’est pas un souci vraiment, je vais le faire”. Donc il y a UN antécédent : le défi. 

– Un autre antécédent c’est donner le choix. Le choix est un antécédent. Quand on donne le choix aux gens, jeunes ou vieux, ils sont plus enclins à adopter un comportement.  Vous sortez avec votre enfant dehors. Il fait froid. Si vous dites à votre enfant “il fait froid, va mettre ton pull rouge”. C’est un antécédent terrible, car il y a un ordre “va mettre”. Déjà, on peut dire “s’il te plait” juste avant, pas forcément pour être poli mais pour adoucir l’agressivité de “va mettre”. On peut donc dire “s’il te plait va mettre ton manteau”. Le “s’il te plait” adoucit votre voix. Ça change votre voix et votre intention. Et ce changement d’intonation change le comportement. Encore mieux, ce serait de dire “on va dehors, va mettre ton pull rouge ou ton manteau vert s’il te plait”. Maintenant l’enfant a un choix. Et le choix en terme de comportement humain amène une plus grande conformité. La recherche en psychologie sur le sujet est très claire : le choix a deux composants. Le vrai choix qu’on a dans nos vies, et l’illusion du choix. L’illusion du choix est très importante.

CR

En France, ce que vous décrivez, on appelle ça un “faux choix”. Et certains pensent que ce n’est pas recommandé car on doit être vraiment honnête avec nos enfants. 

AK

Est-ce que ces parents ont parlé à leurs enfants à propos du Père-Noël ?

CR

Non, je ne pense pas.

AK

Ah intéressant. Donc ils disent toute la vérité à leurs enfants depuis leur naissance ? C’est admirable. 

CR

C’est une bonne question. 

AK

Ça peut faire peur aux enfants. Je veux dire … Je comprends et apprécie le principe. Ce sont des gens qui ne mentent certainement jamais à leur conjoint et disent exactement comment ils se sentent à leurs partenaires. C’est génial, j’admire les parents qui peuvent appliquer un principe de Kant à tous les pans de leur vie sans exception. Cependant nous, on veut changer le comportement avec un antécédent utilisé de manière temporaire pour faire en sorte que l’enfant adopte une habitude sans les punir ou en les punissant de manière vraiment minimale. Et si vous comptez cela comme un faux choix, ou comme quelque chose de trop négatif … okay, c’est entendu. Je ne cherche pas à changer la philosophie de la parentalité de qui que ce soit. Je ne cherche pas à changer la parentalité de quiconque ! Moi j’ai une boite à outils. Vous la voulez ? Super. Vous n’en voulez pas ? Je ne vends rien. Je ne suis pas payé pour cela. (rires)

CR

rires

C’est vrai. Et c’est pour cela que j’aime beaucoup votre approche. Parlons des conséquences. On les appelle aussi parfois punitions. En France, on a tendance à penser que punir c’est apprendre. On pense qu’il est acceptable de punir son enfant car le comportement va changer et si la punition n’est pas suffisante alors je peux punir plus fermement. Qu’en pensez-vous et quelles sont les pratiques que vous recommandez ? Et dans quel contexte ?

AK

Alors il faut être vigilant à considérer 3 perspectives. 

– L’une d’entre elles est plutôt religieuse et dans ce cas fait référence à la Bible. Certaines personnes sont convaincues que celui qui épargne le bâton déteste son enfant mais que celui qui l’aime a l’obligation morale de le discipliner. Il faut comprendre cette perspective. 

– Une autre est culturelle. Comme vous dites par exemple en France avec la punition. 

– Et enfin la dernière c’est comment changer les comportements humains. Et je dois bien avouer que c’est la seule perspective que je peux expliquer et commenter. 

A propos de la dernière perspective : on connaît tant de choses à propos des punitions. Les punitions n’ont un effet que temporaire, ça ne crée pas de nouvelles habitudes. Cela ne représente pas une forme de justice, et seule une toute petite punition peut donner un effet immédiat. Mais si vous voulez développer de nouveaux comportements, il faut développer les opposés positifs. 

Donc si vous voulez punir, je ne peux pas interférer avec vos valeurs ou convictions religieuses. Mais si vous voulez changer les comportements, les punitions corporelles par exemple, ont de terribles conséquences sur le long terme sur les enfants en termes d’agressivité, de santé mentale, de mauvaise santé, ou même de mortalité infantile. La recherche est très claire sur le sujet, ce niveau de punition est très problématique. Les punitions au sens d’une mise à l’écart, ce que l’on appelle timeout, ou le retrait d’un privilège, peuvent contribuer à changer un comportement MAIS vous ne changerez pas un comportement seulement par le biais des punitions car les punitions inhibent seulement temporairement. Les punitions ne créent pas de nouvelles habitudes. 

Un truc qui arrive c’est l’escalade des conséquences, un véritable piège parental. Crier n’a pas marché ? Je vais crier plus fort. Crier plus fort n’a pas marché ? Je vais frapper. Frapper n’a pas marché ? Je vais le secouer et taper plus fort. Et ce que la recherche montre et ce que je vois dans ma clinique c’est que ça n’aide pas du tout. 

D’ailleurs vous voulez être très vigilants dans la manière dont vous punissez votre enfant car vous lui apprenez en montrant vous-même comment contrôler les comportements humains. Plus vous punissez votre enfant, plus vous apprenez à votre enfant comment punir les autres. La recherche montre que les enfants punis interagissent de la même manière avec leurs pairs. En gros, de la même manière que si le parent fait du sarcasme, l’enfant aussi, si le parent frappe une chaise, eh bien c’est pareil. Donc la recherche sur les punitions est très claire. Cependant la science ne surpasse que très rarement les croyances culturelles. Et je ne suis pas là pour juger. Je suis la pour dire ceci : si vous voulez changer un comportement, on a des outils pour cela qui ne produisent pas les effets secondaires des punitions et qui sont plus efficaces. Voulez-vous punir pendant les 2 années à venir ou voulez-vous changer ce comportement au cours des 3 prochaines semaines et en avoir fini avec ? C’est vous qui décidez.

CR

Quels outils peut-on trouver dans les conséquences ? Je pense au timeout, ou à l’ignorance volontaire de l’enfant. 

AK

Oui. Alors le timeout est une conséquence pas si facile à enseigner. Dans un sens, c’est simple : c’est un moment au cours duquel l’enfant n’a pas accès à toutes les choses merveilleuses de son environnement. Mais la raison pour laquelle c’est difficile à enseigner c’est parce que les parents bien souvent n’apprennent pas comment changer le comportement mais à rendre justice eux-mêmes. 

Prenons l’exemple d’un enfant qui aurait cassé un trésor familial qui remonte à 5 générations en arrière. Qui a même les initiales de l’homme de Neandertal. L’enfant le casse. Et un psychologue arrive et dit “tout ce qu’il faut faire c’est 2 minutes de timeout”. Le parent ne peut pas le faire ! Son enfant a cassé un trésor familial et on va juste lui donner 2 minutes de punition ? Non, non, c’est un trésor du patrimoine de la famille. Je vais lui donner 3 ans de timeout ! 

Alors que dit la recherche ? La durée du timeout, après 1 ou 2 minutes, ne fait pas de différence en termes d’impact. Donc on doit apprendre aux parents à développer les opposés positifs : vous apprenez à l’enfant à être précautionneux avec les objets, à ne pas toucher à tout ni à jouer avec tout. Mais on n’a aucun moyen de recoller ce bol si précieux en un morceau … Un an de timeout, priver l’enfant de ses années universitaires, lui confisquer son vélo ou encore l’empêcher de rendre visite à son oncle à Montmartre n’y changera rien. C’est ridicule. Donc on aide les parents à distinguer ce qu’ils font pour eux en tant que parent et non pour leur enfant pour leur apprendre. Vous voulez punir votre enfant car ça vous aide à vous sentir mieux ou alors réalisez que cela est cathartique pour vous, alors que pour votre enfant 2 minutes de timeout ou le retrait d’un privilège, ça suffit. Ca c’est ce que dit la recherche.

Je ne suis pas ici pour changer ce que vous faites. Je suis la pour vous aider à être plus efficace. Vous voulez punir votre enfant ? Cela ne me regarde pas. Mais si vous voulez changer votre enfant, sachez que ça ne marchera pas.

CR

A propos du timeout, si j’ai bien compris : on n’enferme pas l’enfant et on ne les force pas physiquement.

AK

Non. Cela endommagerait votre relation avec votre enfant et ne développerait pas les comportements que vous recherchez. Les opposés positifs vous permettent de développer une relation plus forte, plus positive, et de créer les habitudes que vous recherchez. 

CR

Okay. Qu’en est-il du fait de ne pas accorder d’attention ? Ce que vous appelez “planned ignoring” ou ignorance volontaire ?

AK

Alors un des problèmes ici c’est que les parents réagissent fortement aux comportements qu’ils ne veulent pas voir. C’est-à-dire que l’enfant fait quelque chose et les parents se précipitent dessus et gèrent la crise. “Je t’ai dit de ne pas faire ça !” Ignorer c’est important pour changer. On ne prête pas attention à certains comportements seulement pour faire en sorte que les parents arrêtent de donner beaucoup d’attention à quelque chose qu’ils ne veulent pas voir. Par exemple, deux enfants regardent la télé et commencent à s’agiter. Alors le parent rentre dans la pièce. C’est l’attention du parent donnée au fait que les enfants s’agitent et font du bruit. Je vous conseille de soit ignorer cela, si vous le pouvez. Et par contre précipitez vous et félicitez-les, encouragez-les quand ils sont calmes. Donc Planned ignoring ou l’ignorance volontaire, le fait d’ignorer volontairement c’est un outil qu’on donne aux parents pour qu’ils cessent de prêter beaucoup d’attention aux choses qu’ils ne veulent pas voir. Car quand vous y prêtez attention c’est ce que l’on appelle un encouragement de bas niveau. 

CR

Okay, merci. Que faire lorsque l’enfant refuse le timeout ?

AK

Oh, facile ! vous avez toujours dans votre poche, votre boîte à outils un privilège que vous pouvez retirer sans l’accord de votre enfant. Un petit truc. “va en timeout pour deux minutes” “non je veux pas”. Deux manières de réagir : la première, “okay je te demande encore une fois, va en timeout” “non je veux pas”. “okay. Tu ne peux pas regarder la télé ou jouer a ton jeu vidéo pour le reste de la journée” Et là c’est fini. Donc la réponse à votre question c’est : ayez sous la main un privilège que vous pouvez reprendre qui ne nécessite pas que votre enfant soit d’accord. 

Aussi, quelque chose d’assez contre-intuitif : si vous voulez avoir recours au timeout, vous pouvez répéter de manière presque théâtrale le fait que l’enfant aille en timeout quand tout se passe bien. Dites simplement “on va faire un timeout pour s’entraîner”. “mais qu’est ce que ça veut dire ?” “oh rien, on s’entraîne c’est tout”. L’enfant va en timeout et vous vous précipitez pour le féliciter “je t’ai demandé d’aller en timeout et tu y es allé !”. Qu’est ce que ca change ? Deux choses. La première, c’est que ça augmente les chances d’obéissance dans des moments difficiles. Vous développez un peu plus l’obéissance en général et aussi ça augmente les chances que votre enfant accepte d’aller en timeout. Donc vous pouvez développer ce comportement si vous le souhaitez aussi. Ce n’est pas compliqué. C’est intéressant, non ?

CR

Oui, très intéressant ! En vous écoutant, je me dis que cela ressemble à un entraînement en quelque sorte en fait. J’aime beaucoup cette analogie car cela me fait penser à ce que vous disiez au début de l’épisode avec le pianiste et le violoniste qui s’entraînent pour avoir accès au comportement recherché. 

AK

Et, comme vous le savez sans doute,  les études sur le cerveau montrent que les cerveaux des musiciens qui se sont beaucoup entraînés sont très différents de ceux qui ne se sont pas assez entraînés. Donc quand on change les habitudes, on change aussi le cerveau. On veut établir ces comportements pour qu’ils soient solides, stables. 

CR

Une autre question. On parle souvent de la théorie de l’attachement et de l’attachement sécure et insécure avec les experts du développement des enfants en France. Est-ce que appliquer le timeout ou le planned ignoring, l’ignorance volontaire peuvent avoir des conséquences ou mettre en danger ce lien avec l’enfant ? 

AK

Il y a deux réponses. La théorie de l’attachement tout d’abord. A un moment, on pensait que les gens avaient des attachements sécures ou non. La recherche montre les nuances. Il y a beaucoup de gens qui ont des attachements insécures et qui sont très heureux dans la vie. Il y a aussi des gens qui ont des attachements très sécures qui ont beaucoup de problèmes. En d’autres termes, ce n’est pas aussi clair qu’au début de ces domaines de recherche. Cependant, vous voulez améliorer votre relation avec votre enfant et votre attachement ? Limitez les punitions. C’est le premier truc à faire. Limitez ou arrêtez les punitions et privilégiez les encouragements et le développement des comportements. Donc le lien avec la théorie de l’attachement c’est ça : arrêtez le négatif, arrêtez les réprimandes, arrêtez les relances : donnez la priorité aux opposés positifs, aux encouragements, ça ça développe des comportements, ça développe le lien et l’attachement, pas les punitions. S’énerver, ça repousse. Toucher et câliner, ça rapproche. tout le monde le sait.

CR

En quelques mots, quel message voudriez vous passer aux parents qui nous écoutent et qui traversent des difficultés dans leur parentalité ?

AK

Le but n’est PAS de changer comment les gens sont parents. Le but c’est de mettre à disposition des outils qui ont été validés par la science et qui rendent la vie de tout le monde plus simple. Nos travaux de recherche montrent qu’une fois que vous avez recours à ces techniques et réduisez les punitions, les relations à la maison s’apaisent et s’améliorent. Le taux de dépression parentale diminue aussi. Les enfants sont plus heureux à l’école avec leurs camarades. Donc il y a des effets secondaires ici que les parents ne veulent pas toujours voir mais si vous avez des difficultés à changer des comportements, voici quelques techniques que vous ne connaissez peut-être pas qui peuvent vous faciliter la vie. 

CR

Okay. J’aimerais vous poser une question à propos du timeout dont on fait les louanges en France. Mais j’aimerais vraiment avoir votre avis la dessus. En France, il y a une méthode très connue et recommandée pour le timeout. On isole l’enfant et on l’enferme – pas a cle, juste porte fermée, dans sa chambre si après avoir expliqué 3 fois le mauvais comportement continue. Il y a même une liste de transgressions infantiles a bannir a partir de l’âge de 12 mois, un an donc. Voici la liste : parler trop, parler trop fort, crier, couper la parole, faire trop de bruit, chouiner, ne pas obéir à un ordre, rechigner à faire une tâche, refuser de dire bonjour ou merci, être mauvais joueur, quitter la table pendant le repas, etc. Je m’arrête là, la liste est très longue. Le temps d’enfermement est fixé par le parent et est proportionnel au mauvais comportement. Comme un sens de justice auquel vous faisiez référence plus tôt. Enfin, si l’enfant refuse d’aller dans sa chambre alors le temps d’enfermement augmente sans limite de temps. Que pensez-vous de tout ceci s’il vous plaît ?

AK

Il y a seulement un problème avec tout ce que vous venez de dire. Juste un tout petit problème. Cela va à l’encontre de TOUT ce que l’on sait grâce à la recherche sur le sujet. Vous écoutez là tout de suite me donne envie de me jeter par la fenêtre de ma cave. Cela viole tout ce que l’on sait. Tout d’abord, la recherche montre qu’il n’est pas nécessaire d’enfermer avec un verrou un enfant. L’enfant peut s’asseoir sur une chaise dans n’importe quelle pièce de la maison. Même avec d’autres personnes autour. Dans un coin pour seulement deux minutes. Plus n’est pas nécessaire. La recherche est très claire sur le sujet. Changer un comportement dans la liste que vous venez de lire ne marchera pas ! Ça ne marchera tout simplement pas. Certains de ces comportements s’amènenuisent naturellement avec le développement de l’enfant.  A mesure que l’enfant grandit. Vous voulez changer des comportements, on peut vous aider. Mais le timeout c’est vraiment pas la bonne approche. Qu’est ce que je veux dire par “pas la bonne approche” ? Ce n’est pas moral, c’est anti. Cela va à l’encontre de ce que l’on sait de la science. Si vous me demandiez comment rendre un parent vraiment inefficace, je prendrais cette liste et vous dirais faisons cela. C’est la liste parfaite pour faire en sorte que l’enfant ne change aucun comportement. Ensuite ajoutons des cris et des punitions corporelles et voilà, nous avons le parent imparfait qui obtient le comportement terrible qu’il redoutait. 

Donc non. Non, s’il vous plaît. S’il vous plaît ! La personne qui a écrit cela doit se justifier. Et moi, personnellement, j’accueille les bras grands ouverts toutes celles et ceux qui me demandent si ce que je dis est mon opinion ou la science. Et je partagerais avec grand plaisir les ressources pour l’expliquer. Assurons-nous que la personne qui vous a donné cette liste a la même attitude. Mon attitude n’a rien de spécial. C’est ainsi que marche la science. Si je ne peux pas vous montrer mes sources ou mes preuves alors c’est juste une opinion. Ne m’écoutez pas !

CR

Je peux juste vous dire que cette liste et ces conseils sont basés sur la psychanalyse. 

AK

Regardons les preuves. On ne suit pas les gourous. Vous savez j’adore Galilée, mais aujourd’hui j’accepte tout ce que Galilée ne savait pas. Galilée est toujours important mais on ne le suit pas. On se base sur la mécanique quantique. Pareil pour Freud. Un type brillant. Les techniques qu’il suggère, les thérapies qu’il utilise et ses conseils maintenant vont à l’encontre de la recherche parce qu’on en sait désormais bien plus. Donc y a pas de raison de critiquer Freud. Posez-vous la question : Voulez-vous de la science ou alors voulez-vous voir votre gourou préféré ? Moi je suis agnostique. Vous faites ce que vous voulez de votre vie. Mais si vous voulez que la science vous aide à changer votre relation avec votre enfant d’une manière qui vous aide à façonner des comportements, alors jetez un œil à ces avancées de la science. Vous n’en voulez pas ? Je ne les vends pas. 

CR

Merci beaucoup Alan Kazdin pour cette interview. 

AK

Avec plaisir. Merci de m’avoir invité.